Sibylle Gonzalez et Noémie Nauleau

Sibylle Gonzalez et Noémie Nauleau

Noémie Nauleau a récemment rejoint nos rangs en tant que suppléante au CNCPH pour l’association, en plus de sa nouvelle place d’animatrice du pôle santé du CNCPH. Elle a été interviewée par Sibylle Gonzalez, qui collabore également avec nous depuis quelques temps. Retrouvez cette rencontre fascinante et émouvante ci-dessous.

Noémie, que pouvez-vous dire de vous pour commencer ?
Je suis née le 15 juillet 1985 à Nantes, je suis l’aînée de 4 filles. Je suis atteinte d’une amyotrophie spinale infantile. Le diagnostic a été établi lorsque j’avais presque 3 ans. Mes sœurs ne sont pas atteintes par la maladie.

Comment avez-vous vécu vos années d’enfance ?
J’ai été scolarisée dans l’école de mon village jusqu’au CE1 et là, l’enseignante a jugé que je ne pouvais plus continuer car ma scolarisation nécessitait trop de moyens d’adaptation. J’ai donc été orientée dans un IME.

Comment ça s’est passé à l’IME ?
Je n’ai pas très bien vécu ces années-là mais j’ai fini par tomber sur une enseignante qui a vu mes possibilités et qui m’a fait travailler à la hauteur de mes capacités.

Et sur le plan de la prise en charge de votre maladie ?
Cette période de ma vie a été marquée par l’abondance des interventions chirurgicales et par de nombreuses complications respiratoires. Les chirurgiens voulaient tout le temps ré-intervenir et moi je luttais pour ne pas l’être.

Et après l’IME, que s’est-il passé ?
Je suis entrée dans un collège qui comprenait une section pour enfants handicapés. Mon souvenir est qu’il était difficile de se mélanger avec ceux qui ne l’étaient pas.

Psychologiquement, comment avez-vous vécu cette période ?
C’était le bazar dans ma tête, j’étais très déprimée, mon corps se déformait sans cesse, les opérations s’enchaînaient et les douleurs étaient lourdes à gérer. Ma famille dépérissait, ma mère s’occupait tout le temps de moi, je n’avais plus de vie et ma famille non plus.

Et ensuite que s’est-il passé ?
Je suis partie dans un IEM près de Limoges. J’ai passé mon brevet des collèges malgré mon état de santé critique et je l’ai eu ! Mais le handicap a eu raison de mes études. J’ai alors pensé que ma route était barrée.

Comment avez-vous rebondi ?
J’ai rencontré de supers éducateurs à l’IEM qui m’ont fait comprendre qu’on peut exister aux yeux du monde autrement qu’à travers les diplômes. Il y a la vie sociale et c’est ce vers quoi je me suis tournée. Grâce à eux je me suis rendue compte que j’avais des compétences pour vivre et pour communiquer avec les autres.

Et vos parents dans tout ça ?
Mes parents sont géniaux. Ils ont compris qu’ils devaient me laisser.

Ce n’est pas le cas de tous les parents ?
Non, il y a souvent des mères qui en font trop et qui ne laissent pas de place. Et des pères qui s’en vont.

Et les médecins, est-ce qu’ils vous ont aidée ?
Les médecins c’est génial, mais ils vous ramènent toujours à votre maladie. Quand on les voit, on pense tout de suite qu’on a quelque chose de grave. Quand j’avais 14 ans j’ai dit à mon neurologue, « maintenant il faut me lâcher ». Avec eux, y a plus de place à la vie.

Quand êtes-vous entrée à l’Institut du Mai de Chinon ?
J’avais 24 ans. J’y ai trouvé un super studio domotisé dans lequel je me suis vite sentie chez moi.

L’école de la vie autonome, de quoi s’agit-il ?
L’école de la vie autonome autrement nommé l’Institut du Mai est une formation à l’autonomie et à l’insertion sociale. Nous vivons autant que possible en situation de vie à domicile pour apprendre à gérer le quotidien, la santé, l’argent. Mais il faut également apprendre à sortir seule, se déplacer en sécurité et s’investir dans des activités et/ou associations… Je vous invite à consulter le site de l’Institut du Mai : www.le-mai.org, ce sera bien plus parlant !

J’ai eu l’occasion de visiter récemment l’Institut du Mai. J’ai vu l’importance du rôle que vous y assumez. J’ai trouvé que vous y mettiez beaucoup d’humanité. En facilitant la communication de vos interlocuteurs : avec de l’humour et de l’intuition, vous allez « chercher les gens ».
Cette collaboration qu’Elisabeth Bourbonnais Directrice a instaurée nous permet de vous faire découvrir l’Institut en profondeur. Et j’aime créer du lien.

Vous vivez votre engagement avec enthousiasme ?
Évidemment. Que serait la passion sans le plaisir ? Hihi… Je vis des choses incroyables. J’ai participé au tournage de deux films (le Journal de la Santé – France 5 et un film brésilien pour une chaîne équivalente à ARTE). Et c’est d’ailleurs lors d’une intervention à l’AFM en février dernier que j’ai rencontré Pascal Jacob.

Engagement est votre mot d’ordre ?
Mon mot d’ordre serait : Utopie. Pascal Jacob m’a donné une place où ma parole a un espoir d’être entendu. Je crois que j’ai un message à porter sans en avoir encore le plan précis.

Vous venez d’être nommée par la Ministre à la demande de Pascal Jacob comme sa suppléante au pôle santé du CNCPH, comment voyez-vous votre rôle ?
Pascal Jacob m’a invitée à l’Assemblée Nationale. Je me retrouve dans des endroits prestigieux avec des gens incroyables. Récemment, je me suis rendue à une réunion de la CNH, j’y ai rencontré le Président de la République et je lui ai fait part de quelques idées. Depuis fin avril 2016, je suis également co-animatrice du Pôle Santé Bien-être – Bientraitance avec Madame Aliette Gambrelle. Nous avons des axes de travail à définir conjointement avec les rapporteurs. Je sais déjà qu’il faudra suivre de près la mise en œuvre sur le terrain de la charte Romain Jacob. Je souhaite que nous restions ancrés dans la réalité. Étudier les lois, les décrets, faire de nouvelles propositions sont des objectifs que nous devons tenir. Mais à la fin de la journée, je retourne à ma vie de personne autonome dépendante avec ses auxiliaires de vie, ses médecins, ses infirmiers et j’ai de nombreux amis vivant d’autres situations. Je vis cette vie pour lesquelles nous chercherons sans cesse des améliorations. La santé est un axe essentiel dans la vie d’une personne handicapée. La santé physique, la santé mentale, le bien-être et le bien accompagné. Tout est lié. Et si la santé est facile à vivre, si l’accompagnement est accompagnant, alors la vie devient un vaste terrain des possibles pour toutes les envies que nous devrions avoir. Et que nous aurons !

Noémie, que pensez-vous de notre entretien d’aujourd’hui ?
Sibylle, on a refait mon monde au téléphone, la prochaine fois, on philosophera autour d’un bon verre de vin rouge.

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